Les photos « coup de cœur » de 7 photographes animaliers

Le 11^e numéro du magazine Regards d’Ardenne, paru en septembre 2015, consacre un dossier aux photographes animaliers et nature du Luxembourg belge. Pascal et moi avons eu l’occasion dans ce cadre de rencontrer Philippe Moës, Philippe Toussaint et Olivier Embise.

© Philippe Moës

Ceux-ci nous ont notamment présenté leur photo coup de cœur. En bonus, nous vous proposons de découvrir la photo favorite de 4 autres photographes nature-animalier, accompagnée de leur témoignage. Bonne découverte.

1) Walter Barthélemi

© Walter Barthélemi

« Choisir une photographie « préférée » est une véritable gageure pour un photographe. Chaque image témoigne d’un moment particulier et bien entendu, souvent, c’est une des dernières qui s’imposera car l’émotion ressentie est encore récente… La rencontre avec l’animal sauvage procure son lot d’émotions mais pour l’obtenir dans nos régions, il faut souvent ruser car la faune est constamment sous pression.

Le renard est devenu un de mes sujets de prédilection il y a plusieurs années et je ne me lasse pas de l’observer. Rencontrer ce jeune renard au bord d’une route en plein coeur de la forêt fut une chance que je n’ai pas laissé échapper car je savais que la période me permettrait sans doute une grande proximité.

En septembre a lieu la « dispersion » qui est le moment où les jeunes renards doivent quitter le territoire familial. Les jeunes mâles sont rejetés systématiquement alors que les jeunes femelles sont souvent tolérées et peuvent rester sur ce territoire s’il y a assez d’espace et de nourriture. C’est ainsi qu’on retrouve souvent mère et filles sur un territoire donné au sein d’un groupe social. Les jeunes sont rejetés de manière souvent agressive et ils se retrouvent en quête d’un territoire, perdus et errants. C’est une période où il y a beaucoup de pertes dans les effectifs, notamment à cause du trafic routier… Cette rencontre fut très forte et émouvante alors que se mêlaient jeu, peur et curiosité.« 

2) Martin Dellicour

© Martin Dellicour – Estampe charbonnière- Mésange charbonnière photographiée à Hoursinne (Erezée) le 25 janvier 2014.

« J’apprécie particulièrement cette image car elle est assez représentative de ce que j’aime faire : une image graphique épurée qui met en valeur un animal assez courant mais de manière originale. On n’est pas dans le portrait naturalise mais plutôt dans un tableau… où une harmonie entoure le sujet et les éléments de décor.

Cette photo très monochrome pourrait se situer quelque part entre la photo et le dessin. Un autre aspect qui me plait est d’avoir pu prendre cette image dans mon jardin, preuve qu’il n’est pas toujours nécessaire de courir à l’autre bout du monde pour faire une image qui plait ! »

3) Michel d’Oultremont

© Michel d’Oultremont

« Février 2015, nous sommes au coeur de l’Ardenne. La température est froide, glaciale même, tout est blanc au réveil. J’ai passé la nuit dans ma tente dans une prairie reculée de la civilisation. Le temps est figé, tout est silencieux, quelques lumières de quelques habitations brillent au loin. Je me prépare un thé avant d’entamer cette journée au pays des renards. La matinée avance et je ne croise pas beaucoup d’animaux. Je circule et me laisse guider par mon errance, en espérant croiser, renard, lièvre, chevreuil ou encore le mystérieux chat forestier.

J’aperçois un champ idéal. Je m’allonge dans la poudreuse qui croustille sous mon poids. Recouvert d’un filet de camouflage blanc, allongé dans mon sac de couchage, j’attends. En espérant que la chance vienne à me sourire et qu’un animal veuille bien se montrer. Deux heures plus tard mon souhait s’exhausse, un couple de renards sort à proximité. Nous sommes en plein rut.

En cette période, cet allié des agriculteurs est très actif. Les deux renards commencent à se poursuivre et à jouer ensemble. La scène est belle à travers les jumelles, mais trop loin pour espérer la moindre image. Cela restera gravé dans ma mémoire et non dans celle de l’appareil photo, comme souvent. Un des deux renards me fait la joie tout de même de passer non loin de moi en galopant. Quelques images de cet instant de grande quiétude au coeur de l’Ardenne… ».

4) Pierre Strijckmans

© Pierre Strijckmans

« Voici la photo qui réunit à elle seule beaucoup de points qui font que pour moi une photo animalière est réussie. Elle a été prise sur la commune de Nassogne pendant la période du brame.

La chance du moment a réuni sur cette image quelques critères que nous recherchons sans cesse lors de nos affûts photo: une belle lumière, un animal mythique dans son biotope avec une attitude intéressante. Un certain message aussi puisque le cerf sautant la petite clôture du gagnage nous donne une sensation de liberté. Voilà pourquoi cette photo compte parmi mes préférées. »

5) Philippe Toussaint

© Philippe Toussaint

Philippe Toussaint avoue une certaine fierté pour sa photo de papillons primée lors d’un concours international en Angleterre. Il aime aussi celle toute en couleurs d’une truite à la surface de l’eau : « J’ai mis du temps pour la faire. La truite était en dessous d’un arbre et des insectes tombaient au même endroit. Il fallait la prendre au bon moment, saisir son mouvement et l’onde qu’elle dessinait dans l’eau. J’ai réessayé par la suite sans jamais réussir à faire mieux.»

6) Philippe Moës

© Philippe Moës

« Cette image, issue de mon dernier livre, a beaucoup de valeur à mes yeux. C’est un paysage animalier comme je les aime. Mais au-delà du décor et de la lumière que j’affectionne particulièrement, cette photo a aussi pour moi la saveur particulière de la récompense. Pour la réaliser, il m’a fallu me lever à 2h du matin, faire 100 minutes de voiture, puis 40 minutes de vélo et encore 2 heures de marche pour arriver à pied d’oeuvre au lever du jour…

En espérant la brume. Bien sûr, en temps “normal”, ni brume, ni animaux, ou “seulement” l’un des deux… »

7) Olivier Embise

© Olivier Embise

« L’hiver dernier, il y avait pas mal de neige et j’espérais faire des photos sympas. Alors que je n’avais “rien” vu de spécial en forêt, une amie du village m’a dit qu’elle pensait avoir des bécassines des marais dans son jardin, un animal très discret et rare dans nos régions.

Dans mes jumelles, j’en ai observé une trentaine. D’habitude, elles sont brunes et donc camouflées dans les herbes. Avec la neige, on les voyait très bien. Ne sachant pas si elles étaient farouches ou pas, j’ai pris mes premières photos de loin. Puis j’ai mis un drap de lit sur moi et j’ai avancé en rampant comme une grosse limace.

Trois heures plus tard, j’étais gelé mais à trois mètres. C’était inespéré ! Le décor blanc de neige m’a offert un côté épuré et des détails de leur plumage… »