Les 4 saisons du cerf

À l’approche de la saison du brame du cerf, je vous propose de redécouvrir ce texte écrit pour le magazine Regards d’Ardenne sur la vie du cerf au long de l’année, illustré par des photos de Gerard Jadoul et Philippe Toussaint.

© Gerard Jadoul

Le cerf a toujours été chargé d’une symbolique importante et ce, dès le Moyen-âge. Qui ne connaît la légende du cerf crucifère apparu à Hubert en forêt d’Ardenne et qui le poussera à la conversion ? Les ouvrages de vénerie relatent tous des scènes de mise à mort du cerf extrêmement ritualisées, à l’image de la mort du Christ. On parle souvent de sacrifice dans ces textes consacrés à la chasse du cerf.

 Celui que l’on a l’habitude de qualifier de roi des forêts d’Ardenne est pourtant d’une grande discrétion, repoussé qu’il a été des plaines herbeuses qui étaient son aire de distribution naturelle vers les forêts à mesure que l’homme gagnait des terres de culture sur son environnement immédiat.

L’hiver…

© Philippe Toussaint

L’hiver est une période particulièrement difficile pour nos grands mammifères : froid, neige en Ardenne, nourriture rare, les cerfs se déplacent très peu, épargnant leur énergie pour lutter contre le froid. Ils restent le plus souvent en lisière de la forêt. Février voit la chute des bois chez les mâles. Les biches restent groupées au milieu du massif forestier avec les faons de l’année et se déplacent elles aussi très peu. Leur gestation a commencé avec le brame et se terminera au printemps après plus ou moins 8 mois.

Le printemps…

© Gerard Jadoul

Avec le printemps et ce petit allongement imperceptible des jours, les animaux reprennent leurs activités. Dès mars-avril, les mâles vont se reboiser lentement pour être couronnés en juin. C’est extrêmement rapide puisque la repousse des bois se fait en un peu plus de 3 mois.

Les biches gestantes vont commencer à s’éloigner de la harde pour se retirer dans des fourrés et mettre bas vers mai, au moment où la nourriture est abondante. Le faon ne quitte pas l’endroit où il est né. Il en est d’ailleurs incapable avant quinze jours. Sa mère ne s’éloigne jamais très loin et seulement pour se nourrir. Elle va l’allaiter durant six mois, parfois plus s’il est n’est pas à nouveau gestante, au cours desquels le jeune va lentement devenir autonome pour se nourrir, se déplacer et « faire » sa place au sein du groupe.

L’été…

© Gerard Jadoul

L’été est la période d’abondance : jeunes pousses, arbrisseaux, fruits sauvages, herbe abondent et nos cervidés en font grande consommation.

L’automne…

© Gerard Jadoul

Les jours raccourcissent lentement et à mesure que l’automne s’approche, la nervosité s’empare des mâles. Dès qu’un nombre suffisant de biches sont réceptives (cela ne dure que quelques heures), les meilleurs reproducteurs vont tenter de les regrouper pour les couvrir. En effet, le cerf est polygame. Bien évidemment, ces biches attirent la convoitise d’autres mâles et c’est là qu’interviennent les brames et les claquements de ramures des cerfs qui s’affrontent. Mais on n’en arrive pas toujours là.

Les cerfs se jugent tout d’abord à la voix avant d’avoir un contact visuel. Après s’être jaugés, il arrive le plus souvent que le dominé s’éloigne sans rien tenter. Mais quand les deux animaux s’avèrent être de puissance égale, l’affrontement est quasi inéluctable. C’est alors le choc. Mais tout cela est extrêmement ritualisé et il est rare que de graves blessures soient occasionnées à l’adversaire. Mais ce bruit, au milieu de la nuit, amplifié par le relief et l’espace forestier, reste un moment de grande émotion pour celui qui l’entend.

Vers la mi-octobre, l’activité des mâles va aller décroissant. Les biches vont se regrouper en noyaux familiaux tandis que les cerfs se retirent en petits groupes dans d’autres quartiers du massif. La cathédrale forestière se dépouille doucement de ses feuilles sous les vents et les pluies d’automne. Puis ce sera le lent endormissement des grands arbres qui se préparent à la longue période hivernale.